L’Internet Archive, autoproclamé gardien du patrimoine numérique et ardent défenseur d’un accès libre à la connaissance, essuie un nouveau revers judiciaire. Une cour d’appel new-yorkaise vient de confirmer, ce mercredi 4 septembre, la décision de première instance condamnant l’organisation pour violation de droits d’auteur .
Au cœur de cette saga judiciaire qui n’en finit pas : le système de « prêt numérique » mis en place par l’Internet Archive, qui permet aux internautes d’emprunter des versions numérisées de livres, à la manière d’une bibliothèque traditionnelle.
Le « prêt numérique » : un champ de bataille juridique intense
L’Internet Archive, fort de son catalogue colossal de documents, livres, logiciels et pages web, se voyait reprocher par quatre éditeurs de porter atteinte à leurs droits et de nuire aux ventes en permettant le prêt d’ouvrages numériques sans autorisation ni compensation adéquate.
L’organisation, s’abîmant sans doute dans les méandres du droit d’auteur, avait tenté de faire valoir le principe de « fair use », arguant que le prêt numérique était assimilable au prêt physique et s’inscrivait dans une démarche éducative et de recherche. L’Internet Archive soutenait notamment que son système de prêt numérique, en limitant le nombre d’emprunts simultanés pour un même ouvrage, respectait l’esprit du droit d’auteur et ne portait pas préjudice aux éditeurs.
Franchement, on peut se demander si l’Internet Archive n’a pas manqué une occasion de faire valoir des arguments juridiques plus percutants. Par exemple, l’organisation aurait pu mettre en avant le principe du « droit de prêt public » qui existe dans certains pays et qui permet aux bibliothèques de prêter des œuvres protégées sans autorisation préalable, moyennant le paiement d’une redevance aux auteurs.
L’Internet Archive aurait sans doute pu argumenter que le prêt numérique, en tant que prolongement naturel du prêt physique, devrait bénéficier d’un régime juridique similaire. L’organisation a aussi invoquer la notion de « limitations et exceptions » au droit d’auteur, qui autorise certains usages d’œuvres protégées sans autorisation du titulaire des droits, dans des circonstances spécifiques.
L’Internet Archive face à un dilemme cornélien ?
Force est de constater que cet argument n’a pas convaincu la cour d’appel, qui a considéré que l’ampleur du système mis en place par l’Internet Archive dépassait le cadre du « fair use ». En effet, l’organisation ne se contentait pas de prêter quelques ouvrages confidentiels, mais proposait un catalogue riche de plusieurs millions de titres, menaçant ainsi l’équilibre économique du marché du livre numérique. La cour a estimé que l’Internet Archive, en se substituant aux éditeurs et en court-circuitant les circuits de distribution traditionnels, portait atteinte aux droits exclusifs des auteurs et nuisait à leur capacité à tirer profit de leurs œuvres.
L’Internet Archive, qui n’a jamais caché son aversion pour les restrictions imposées – selon elle à tort – par le droit d’auteur, devra sans doute revoir sa copie ou trouver de nouvelles armes pour poursuivre son combat pour un accès libre à la connaissance .